Lieusaint (77), 35 kilomètres au sud-est de Paris. Voici une commune dont la population a plus que doublé ces vingt dernières années, atteignant les 14 000 habitants. C'est dire si les capacités de prise en charge par les équipements publics y sont mises à rude épreuve. … La Ville a donc lancé en 2011 un concours d'architecture afin de se doter d'une Maison de la petite enfance au programme ambitieux : sur 1 200 mètres carrés, crèche familiale, bureau médical pour l'admission et le suivi des bambins, pôle multi-accueil de 40 berceaux, relais d'assistantes maternelles et lieu d'accueil enfants-parents. Bien loin d'assurer seulement la garde des petits, cette Maison, telle qu'elle fonctionne depuis deux ans, est un lieu ouvert à toutes les nounous, indépendantes comme employées municipales, afin qu'elles se rencontrent et échangent leurs expériences ; un lieu aussi où les parents peuvent prendre conseil auprès de ces mêmes professionnelles.
Ouverture de l'équipement, pluralité de fonctions : cette double nature s'exprime haut et fort dans le parti pris architectural qu'a imaginé l'agence Nomade, lauréate du concours.
Deux volumes tout de verre disent l'ouverture, l'un formant le hall d'accueil général, en façade nord, l'autre faisant son pendant en façade sud, comme pour projeter sur l'extérieur l'espace mutualisé de jeux. Entre eux s'étire la galerie ponctuée de patios qui donne à l'édifice son axe, et dessert l'ensemble des composantes programmatiques : administration, espace mutualisé, crèche, pôle multi-accueil… La pluralité de fonctions se manifeste dans la façon dont lesdites composantes, vues de la rue, forment autant de volumes distincts par leur disposition en quinconce, par les différences de hauteur au faîte de leur toit, ainsi que par les asymétries et plissements dans le plan de ces couvertures. Les architectes produisent de la sorte l'impression de maisonnettes assemblées dans « un petit village convivial ». Ce dernier, prenant place entre le centre ancien et les extensions pavillonnaires, étend l'urbanité du premier en direction des secondes. La formule du toit à deux pentes était imposée par le PLU. Mais l'archétype a ici tout son intérêt, puisqu'il participe de l'image villageoise recherchée. Poussons l'allégorie plus loin encore peut-être que Nomade ne l'a fait : on peut voir dans la façon dont les toitures se chevauchent, s'embrassent parfois d'une maisonnette à l'autre, comme la plus puissante expression de la communauté voulue ici. Communauté fonctionnelle, avec sa mutualisation de certains espaces, son mélange des vécus, et communauté bâtie, par un enchevêtrement des volumes renvoyant à l'image fantasmée du village de toujours.
Les toitures se chevauchent par endroits, et elles se retournent presque jusqu'à terre sur l'ensemble des façades est et ouest, c'est-à-dire sur les longs côtés de l'édifice.
Pareil retournement de position produit un renversement de situation : la tuile employée, de traditionnelle en toiture, devient contemporaine par son extension en façade. La construction y gagne aussi une enveloppe durable, et dont la continuité, grâce aux membrons en jonction des plans oblique et vertical, protège des ponts thermiques. La tuile choisie est plate ainsi que de coutume à Lieusaint. Ce modèle autorise une pose identique entre le toit à 35 degrés et la verticalité des parois, à savoir sur lattes et contre-lattes. Une telle enveloppe, s'étendant du faîtage au soubassement, pourrait lasser à la longue. Les architectes ont prévenu le danger en juxtaposant des tuiles de différentes dimensions - 27 × 17 ou 26 × 17 centimètres -, et de trois teintes : miel clair, chocolat au lait, chocolat noir. Avec ces variations dans la trame et le coloris, on croirait voir quelque habillage en tavaillons de bois de tradition dans le Jura ou les Alpes, buriné par les éléments. Voilà qui tombe bien : Nomade a choisi le mélèze pour l'ensemble des pignons, tableaux de baies compris, et l'accord se fait naturellement avec les tuiles paraissant faites de bois. Dans les patios, bardages de mélèze et habillages de tuiles alternent aussi. Vues à travers les grands pans vitrés, ces variations autour de l'ocre contrastent avec la blancheur de la galerie centrale et des autres espaces intérieurs.
La disposition verticale des clins de mélèze est accentuée par les épines rythmant les pignons sur toute leur hauteur.
Des retours faits du même bois donnent à chaque pignon un encadrement puissant, dont le nez est surligné et protégé de la pluie par un bandeau métallique. Pareil dispositif prémunit aussi de la pluie la partie supérieure des revêtements, zone particulièrement sensible, de la même façon que les couvertines équipant les bardages dans les patios. Hormis le pare-pluie de rigueur derrière la lame d'air faisant ventilation, on a aussi pris soin d'empêcher les gouttes de ricocher sur le pied de bardage, en arrêtant celui-ci au-dessus du soubassement. Ce dernier court également sous les façades en tuiles, plaçant ainsi tout l'édifice sur un fin piédestal.
Retrouvez l'ensemble des plans et des coupes dans exé 32 spécial bardages
FICHE TECHNIQUE
LOCALISATION Lieusaint (77), France
ANNÉE 2016
ARCHITECTE Nomade architectes - Raphaël Chivot, Matthieu Laviolle, Vincent Le Garrec
COLLABORATEUR Bagdan Rosen (suivi de chantier)
MAÎTRISE D'OUVRAGE Ville Lieusaint (77)
PROGRAMME Restructuration et extension de l'école
SURFACE DE PLANCHER 1 200 m²
COÛT DES TRAVAUX 3,2 millions d'euros HT
CONCOURS Mars 2 011
LIVRAISON Avril 2016
BUREAUX D'ÉTUDES ET CONSULTANTS
TCE ETHA
CONTRÔLE SSI Alpha Control
ENTREPRISES
GROS ŒUVRE EGMB
CHARPENTE BOIS CLOS COUVERT Arbonis
AMÉNAGEMENT INTÉRIEUR Sogefi
CVC PLOMBERIE Abraysienne
ÉLECTRICITÉ Portelec
CUISINE Froid 77