ENTRETIEN AVEC AVEC GIANLUCA GAUDENZI
Architecte associé de NZI Architectes
Que représente le bois dans la pratique de votre métier ?
Disons que le bois est une technologie que nous utilisons ou à laquelle nous pensons dès le premier jet, c'est un peu une évidence de nos jours de penser aux matériaux durables et renouvelables. Ensuite, la notion de contexte est importante, ainsi que celle du coût. Il s'agit donc de faire la synthèse entre ces informations afin de faire un choix. Enfin, il y a aussi un client qui peut être plus ou moins sensible à ce sujet, mais pour nous, le bois reste une évidence.
Le mur à ossature bois est un peu le colombage du XXe siècle ; avez-vous le sentiment d'un retour aux sources quand vous le mettez en œuvre ?
Oui, totalement, même s'il s'agit aussi d'une question d'avenir. Il est vrai qu'à l'instar d'autres disciplines, finalement, nous piochons un peu dans le passé pour inventer l'avenir. Aujourd'hui, en matière de développement durable, la nature reste une source inépuisable de solutions.
Les murs à ossature bois sont des produits constructifs préfabriqués, comment cela influence-t-il votre manière de concevoir un projet ? N'est-ce pas un facteur limitant d'un point de vue créatif ?
Non, pas vraiment, puisque nous travaillons d'abord sur le fonctionnement du projet. Ensuite, une négociation entre programme et rationalité constructive vient façonner le projet. Puis, ce sont les besoins spécifiques du programme - comme des grandes portées ou l'absence de porteurs verticaux -, qui alimentent l'architecture… Donc, pour nous, le fonctionnement, le plan et le programme restent les points forts de la démarche et du projet. Imaginer des bâtiments en bois, c'est une évidence. C'est ensuite la technologie qui s'adapte au projet. Parce qu'il faut aussi considérer que la technologie est flexible. Nous pouvons, par exemple, être confrontés à des questions de béton beaucoup plus contraignantes.
Le bois est un produit aujourd'hui très industrialisé ; qu'en est-il de son âme ?
C'est une avancée que de pouvoir utiliser des matériaux naturels et sains dans la construction, et c'est leur industrialisation qui le permet. Si nous voulons avancer et donner des réponses qui soient de plus en plus contextuelles, à notre sens, il n'est pas judicieux de rester dans la tradition coûte que coûte. Ce qui est intéressant, c'est d'étudier les qualités de chaque élément : un matériau, un système constructif… Et pourquoi ne pas les détourner pour que la réponse soit, elle, beaucoup plus vaste tout en restant cohérente avec la notion d'impact carbone et de programme ? Après, il ne faut pas forcer les choses ; il faut que cela soit faisable et juste. Nous ne sommes pas obnubilés par un seul matériau, nous sommes des architectes polyvalents, vigilants et ouverts ; il n'existe pas que le bois dans le panorama de la construction.
À quelle phase du projet avez-vous opté pour un système de murs à ossature bois ?
En phase APD nous avons proposé une variante en construction bois, avec un chiffrage actualisé parce que cela supposait d'augmenter le budget de 10 %. Tout en gardant à l'esprit que nous devrions peut-être finalement basculer sur une technologie plus traditionnelle, comme celle du béton.
Et pourquoi le bois, finalement ?
Parce que cela nous semblait évident pour un petit équipement de plain-pied posé dans un parc ; c'était cohérent et il y avait une sorte de justesse par osmose. Cela signifiait travailler dans un parc avec un matériau complètement calé dans le contexte et qui offre, sur le papier, une rapidité de mise en œuvre grâce à la préfabrication. Une fois que le maître d'ouvrage était ouvert à cette proposition, la rapidité de mise en œuvre et les avantages d'un chantier sec ont fini de le convaincre puisque nous étions dans un contexte de petit village pavillonnaire : les particuliers qui vivent à côté voulaient que cela se passe dans la douceur.
Comment arbitrez-vous entre les éléments bois visibles et invisibles ?
Malheureusement, c'est souvent la réglementation qui arbitre ces choix. Pour ce projet, tout ce qui est visible concerne les éléments fins, comme les épines qui soutiennent le vitrage. Ces éléments ont été calculés pour être cohérents avec la structure primaire et pouvoir se passer d'éléments métalliques. C'est un mariage entre le remplissage et la structure. À chaque fois que vous avez une partie vitrée, vous voyez du bois. Quand vous avez du plein, le bois n'est pas visible ; c'est l'architecture qui aide à faire des choix. Ensuite, l'acoustique va jouer un rôle primordial. Il ne faut pas choisir les raccourcis : le budget, vous l'avez, et il faut le gérer d'une manière globale.
Une fois que Techniwood/Écologgia vous propose ses solutions, vous vous adaptez aux produits ou c'est eux qui s'adaptent au projet ?
Cela va dans les deux sens, en fonction du projet et de la solution qui est proposée. Pour ce projet, nous avons travaillé avec I+A, un bureau d'étude expérimenté, et c'est ensemble, avec l'entreprise, que nous avons fait des choix. Les propositions qui ont été faites par l'entreprise pour simplifier le processus sans aucun impact du point de vue architectural ont été acceptées car cohérentes avec le projet. Le chantier est un moment permettant la discussion entre les différents partenaires afin de trouver le chemin le plus évident vers la réussite du projet.
► Entretien paru dans exé 35 spécial bureaux