Sur le territoire de la ville de Courbevoie, enclavé entre le boulevard circulaire, la dalle de la Défense et une autre tour en surplomb, le site est celui de l’ancien immeuble Veritas qui totalisait quelque 11 000 mètres carrés. Dans le cadre du plan de renouveau du quartier d’affaires voté en 2006, le maître d’ouvrage Sogécap (compagnie d’assurance-vie du groupe la Société Générale) en avait décidé la démolition afin d’y édifier un nouvel IGH (immeuble de grande hauteur) visant les 50 000 mètres carrés. À la suite du concours organisé en 2007, les lauréats Anthony Béchu et Tom Sheehan pousseront les études, en s’adjoignant les compétences d’ingénieur de l’architecte Daniel Vaniche (DVVD), jusqu’à obtenir la première tour à exo-structure de la Défense. D’autant plus inédite dans cette arène du tout béton ! Culminant à 171 mètres de hauteur après trois années de chantier, D2 est dotée d’un plan ovoïde, optimal au regard de la configuration du terrain d’assiette, qui génère un volume aux perceptions diverses selon l’angle de vue. Vers Paris, il fait front avec finesse et élancement ; depuis Courbevoie, le profil s’élargit tout en restant très allongé ; et dans la perspective du boulevard circulaire, il présente un dos plus arrondi encore. S’ajoutent à cela ses multiples reflets sur les façades alentour, caractérisés par cette exo-structure d’acier, ciselée et finement dimensionnée.
Plusieurs contraintes et volontés ont conduit au choix de cette mise en œuvre particulière qui consiste à déporter à l’extérieur de l’ouvrage tout ou partie de la structure porteuse. Et qui a pour conséquence immédiate de réduire l’emprise du noyau central en béton, les charges verticales et horizontales étant alors équitablement partagées entre le tronc et la résille métallique externe. D’abord une exigence de l’Epadesa (Établissement public d’aménagement de La Défense Seine Arche), qui souhaitait rétablir des connexions efficientes entre Courbevoie et le quartier d’affaires jusqu’alors interrompues par un boulevard circulaire plus routier qu’urbain. D’où un travail tout en transparence des cinq premiers niveaux de la tour, qui accueillent les espaces de convivialité : restaurant, brasserie, salle de fitness et halls. À la même altimétrie, la sphère publique est invitée sous la tour, dont les pieds d’acier deviennent une arcade accueillante par le retrait vers l’intérieur du mur-rideau des halls bas et haut. Depuis Courbevoie, l’accès à la dalle est alors clarifié et facilité. Il s’agissait ensuite de développer 28 plateaux de bureaux généreux, flexibles et lumineux, malgré un site à la géométrie et aux dimensions contraignantes. Pousser une partie de la structure porteuse à l’extérieur permet une diminution évidente et directe du nombre de poteaux intérieurs. Réduits au nombre de six, trois en proue et trois à l’arrière, à équidistance entre l’enveloppe et le noyau de béton, ils masquent leur présence, se font à peine perceptibles en s’intégrant à la distribution interne des espaces de travail, multipliant ainsi les différentes possibilités d’aménagements. Et enfin il y a l’image, car au-delà de la hauteur qui fait son effet, cette nasse formée d’immenses losanges, dont le capotage isolant en aluminium est facetté, renouvelle absolument la typologie de la tour à la française.
L’image de la nasse du pêcheur, en rotin tendu par une tige centrale, est d’ailleurs évoquée par les architectes pour expliquer le fonctionnement de cette structure mixte. Au rotin se substitue l’acier laminé, ici des profilés HD 400 assemblés sur site pour former de grands V de 14 tonnes disposés face à face, et dont l’empan compte six niveaux, soit sept planchers dont trois reçoivent les nœuds de la résille. À chaque nez de plateau, une poutre de rive relie l’exo-structure au noyau en béton via des poutres alvéolées, IPE 450 et HEA 450, qui reçoivent les planchers collaborants, les faux planchers et tous les réseaux techniques. Quant au noyau central en béton autoplaçant, qui accueille donc tous les espaces servants et les circulations verticales, il a été mis en œuvre par coffrage glissant et autogrimpant. Enfin, le clos est assuré par un mur-rideau en aluminium classique placé vers l’intérieur, laissant l’épaisseur de la structure à l’extérieur : des allèges réduites et des montants verticaux fins offrant des surfaces vitrées généreuses, bien que l’effet eût été sûrement plus cohérent si les menuiseries avaient pu suivre le dessin en losange, ce que les contraintes techniques et de sécurité n’ont pas permis.
Telle une descente de charges sculpturale, les efforts structurels sont visibles et dynamiques, générant directement la silhouette entière de l’édifice, terminée par un diadème désengagé, ouvert au vent, qui accueille un « jardin des nuages ».