C’est à la lecture de Cosmic Architectures in India, d’Andreas Volwahsen, rassemblant les coupoles édifiées par un maharadjah passionné d’astronomie, que la photographe Noémie Goudal a pour la première fois l’idée d’une série qu’elle intitule Observatoires. Quelques années plus tard, ce sont dix belvédères en béton brut et anguleux, mi-dôme mi tour, perchés entre dune et ciel, qui percent la pénombre du BAL. Exposés dans le sous-sol de l’espace parisien avec d’autres de ses créations, les édifices n’en apparaissent que plus mystérieux, univers de pierre oniriques et lointains. Mais au visiteur qui s’en approche, il ne faut, en dépit de leur apparente perfection, qu’un seul coup d’œil, nez sur l’image, pour en découvrir la supercherie. Pliures, imperfections : les architectures de Noémie Goudal ne sont en effet que de magnifiques trompe-l’œil, fabriqués de toutes pièces pour les besoins de la photographie. De près, elles révèlent en effet leur triste vérité, celle d’objets à deux dimensions, bricolés et non pas construits, dont le papier, fixé sur des armatures en bois, semble se décoller sous l’effet de l’humidité. Dans ces patchworks de structures, se retrouvent ainsi des fragments d’autres bâtiments, usines ou entrepôts, que l’artiste, au hasard de ses pérégrinations, a photographié en Allemagne, en France et au Royaume- Uni. Loin des coupoles indiennes de Delhi et Jaipur, qui servent de départ à son projet, c’est en effet dans les traits rudes de l’église de Neviges, en Allemagne, qu’elle trouve son inspiration : chef d’œuvre du brutalisme, le concepteur Gottfried Bohm a donné à ce lieu de culte des allures de grotte. Une quête de l’infini, de la caverne au firmament, qui mène Noémie Goudal à transcender des bribes de bâti. Recomposés, puis placés au sein de panoramas immenses, à la géographie imprécise, plage ou rivage, ces collages d’1,80 mètre en perdent échelle et planéité… tout en y gagnant une nouvelle spiritualité. « Un peu comme les mégalithes de Stonehenge, ils semblent dès lors se diriger vers le sacré, vers l’inconnu ».