La proposition d'implanter un centre culturel dans la ville de Skellefteå est avant tout née de la volonté de ses habitants. Lors d'une consultation lancée par la mairie dans le cadre d'ateliers participatifs, les citoyens proposent cette idée comme manière de rendre à cette ancienne ville minière ses lettres de noblesse et d'inverser la tendance démographique, en déclin depuis plusieurs années. Répondant au concours lancé par la commune, les architectes de l'agence White Arkitekter conçoivent un projet alliant savoir-faire local et modernité technique, pour lequel ils mettent en œuvre des éléments préfabriqués en épicéa, une essence à partir de laquelle on obtient des lames de bois solides et naturellement imputrescibles. « On assiste à un développement très rapide des procédés techniques sur la construction bois, ce qui est très excitant pour les architectes et les ingénieurs. Le centre culturel Sara et ses 20 étages auraient été parfaitement inenvisageables sans l'émergence de ces technologies nouvelles », soutiennent les architectes. Dans cette ville du nord-ouest de la Suède entourée de forêts, la construction en bois est une tradition de longue date. Ainsi, les arbres sélectionnés pour le centre culturel sont issus d'un rayon de 200 kilomètres autour de la ville, puis transformés dans une scierie distante de seulement 50 kilomètres du site.
Le centre culturel est baptisé en hommage à Sara Lidman, une écrivaine et essayiste originaire de la région de Skellefteå. En effet, le nom annonce le programme, avec quelque 30 000 mètres carrés dédiés au rayonnement de la culture artistique suédoise et scandinave. Les niveaux bas du centre culturel hébergent un théâtre doté de six scènes, un musée, une galerie d'art, un restaurant et la bibliothèque municipale. La tour, quant à elle, abrite un hôtel de 205 chambres, un centre de conférences et un restaurant ; au dernier étage, une piscine et un spa complètent le tableau. Pour créer un ensemble architectural harmonieux à même de répondre à cette commande titanesque sans entrer dans des ordres de grandeur écrasants, les architectes font varier les échelles des différents lieux requis par le programme, composant ainsi un tout à partir de plusieurs volumes indépendants. Cette variation repose sur le dimensionnement des espaces, mais également sur de savants jeux de transparence et d'opacité. Ainsi, les volumes les plus bas côtoient les rues les plus étroites, tandis que la tour se dresse face à une place ouverte. Le projet inclut en outre plusieurs espaces extérieurs conviviaux, qui deviennent des belvédères depuis lesquels les visiteurs peuvent discuter, échanger ou simplement contempler la vue.
La grande diversité de programmes et l'échelle globale de projet requièrent, de la part des architectes, une attention particulière quant aux détails concernant les questions globales d'usage, mais aussi d'acoustique et, surtout, les principes statiques. La tour de l'hôtel met ainsi en œuvre des éléments préfabriqués en bois lamellé-croisé, reposant sur un ensemble de poutres et colonnes en bois lamellé-collé. Les chambres, préfabriquées comme des modules 3D, se supportent et se stabilisent les unes les autres, flanquées de part et d'autre de la tour de deux cages d'ascenseur entièrement montées en panneaux lamellé-croisé. Le béton est éliminé d'emblée de la structure porteuse, ce qui permet de gagner du temps de chantier tout en réduisant drastiquement l'empreinte carbone de la construction. Quant au centre culturel, sa conception repose également sur la préfabrication des éléments structurels. Les poteaux, poutres, dalles et murs sont préfabriqués dans un atelier des environs, puis assemblés sur site. La standardisation des hauteurs entre les différents niveaux et une trame structurelle commune aux divers programmes permettent d'augmenter le nombre d'éléments similaires, ce qui facilite leur production tout en réduisant la marge d'erreur lors de la fabrication. Grâce au grand soin apporté à l'édifice dès sa conception, les architectes parviennent à créer un ensemble cohérent et dont la taille impressionnante n'est pas une entrave à son exemplarité. Le centre culturel forme un ensemble compact moyennant une enveloppe très performante, un système de ventilation hybride et le recours aux énergies renouvelables. Les architectes arrivent même au calcul suivant : en additionnant le gain d'énergie prodigué par les panneaux solaires installés en toiture et l'usage d'un bois local et préfabriqué à proximité du site, les émissions de carbone produites par le bâtiment seront compensées d'ici 50 ans. « En tant qu'architectes, nous nous sentons très concernés par la question du développement durable. Notre agence s'est fixée pour objectif de ne construire que des projets neutres en carbone à l'horizon 2030, et cet objectif passe fondamentalement par une conception d'excellence », notent les concepteurs. Un objectif rationalisé, qui repose sur une stratégie en quatre points : une conception projetée sur le long terme, notamment quant aux questions de biodiversité et de changement climatique ; la favorisation d'opérations de préservation et de transformation de l'existant ; une économie d'énergie et de matériaux ; enfin, des chantiers employant des matériaux à faible impact carbone, favorisant les énergies renouvelables et suivant les principes de l'économie circulaire.
LOCALISATION Skellefteå, Suède
ARCHITECTES White Arkitekter
MAÎTRISE D'OUVRAGE Municipalité de Skellefteå
PROGRAMME Construction d'un centre culturel et d'une tour à ossature bois hébergeant un théâtre, un musée, une bibliothèque et un hôtel
SURFACE DE PLANCHER 28 000 m²
CONCOURS 2016
LIVRAISON Septembre 2021
BUREAUX D'ÉTUDES ET CONSULTANTS
STRUCTURE Florian Kosche, TK Botnia, WSP
TECHNIQUE Incoord, WS Konsulterna
ÉCLAIRAGE White Arkitekter
ÉNERGIE Skellefteå Kraft, ABB
ENTREPRISE
GÉNÉRALE HENT AS
MATÉRIAUX ET ÉQUIPEMENTS
BOIS Martinsons Trä AB
CONCEPTION MODULAIRE Derome
FAÇADE Lignas UAB
ÉLECTRICITÉ Bravida AB, Schneider Electric AB