Tout aurait commencé par du linge étendu entre les fenêtres des immeubles de Gênes, bariolant les rues de la ville, dont la légèreté flottante aurait inspiré le fils d’un humble constructeur. Ce jeune homme, Renzo Piano, ne soupçonne pas encore qu’il deviendra l’un des plus grands architectes contemporains...
Si l’histoire n’est peut-être qu’une légende, la carrière, elle, est bien réelle : en attestent les quelques 120 projets élaborés en 50 années de pratique. À l’occasion de cet anniversaire, la Cité de l’architecture et du patrimoine propose une exposition organisée autour d’une quinzaine d’édifices dessinés par le Renzo Piano Building Workshop. Hormis le centre culturel de Tjibaou à Nouméa, toutes les œuvres présentées, telles la vertigineuse tour The Shard ou le discret monastère Sainte-Claire, datent du XXIe siècle. Plus étonnant, certaines n’ont pas encore été livrées, à l’image du centre culturel de la Fondation Stavros Niarchos. Une sélection qui frappe donc par son actualité, et pour cause : il n’est pas ici question de rétrospective qui expliciterait la « patte » de l’architecte dans une scénographie passive et essentiellement narrative, mais bien d’assister à une sorte de work in progress. Chercher d’ailleurs à comprendre la « méthode » de Renzo Piano autrement relèverait presque du contre-sens, tant ce travail est le fruit d’un perpétuel renouvellement, difficilement réductible à une griffe ou à de quelconques obsessions. Ainsi, l’exposition rend compte d’un processus de création, fondé sur la discussion, l’expérimentation et la remise en question des recherches antérieures, dont témoigne la diversité des réalisations de l’agence. Une démarche que les visiteurs sont invités à saisir en prenant place autour des tables où sont présentés les projets individuellement, afin de consulter croquis, plans, coupes, maquettes, books et témoignages de collaborateurs. Cette documentation riche illustre la genèse des constructions et raconte entre autres les origines de la forme atypique de la fondation Jérôme Seydoux-Pathé. En toute conformité avec l’humilité de l’architecte, l’exposition nous impliquerait presque jusqu’à demander : « Et vous, qu’auriez-vous dessiné ? ».