Depuis sa création en 2003, la ZAC Île Seguin-Rives de Seine à Boulogne-Billancourt a fait - et fera - couler beaucoup d'encre et de béton, jusqu'à son achèvement prochain prévu en 2020 avec l'arrivée du métro Grand-Paris à la station Pont-de-Sèvres. Depuis l'arrêt des lignes de production Renault en 1992 et l'adoption des grands axes d'aménagement par le conseil municipal en 2002, moult projets, négociations, modifications et autres valses d'acteurs ont bouleversé la fabrication de ce morceau de ville héroïque. L'agence Beckmann/N'Thépé y a livré l'une des dernières opérations sur les quelque 352 300 mètres carrés de logements programmés dans la partie orientale de cet immense site. À l'extrême est du fameux Trapèze boulonnais, la parcelle jouit de vues multiples sur les coteaux de Sèvres, les îles Seguin et Saint-Germain, le nouveau parc urbain et le grand paysage francilien des Hauts-de-Seine. Matérialisant tout à la fois l'entrée et la sortie de la ZAC, le bâtiment, bien ancré dans le sol via un soubassement sur deux niveaux composé de verticales opaques et vitrées, rassemble 159 logements, dont 19 sociaux, un foyer Alis dédié aux personnes souffrant du locked-in syndrome, un jardin privé et 220 places de parking. Des contraintes de la géométrie triangulaire de la parcelle, Aldric Beckmann et Françoise N'Thépé se sont joués en développant quelque 15 600 mètres carrés de surfaces de plancher, tel un ruban qui ondoie dans toutes les directions. En partie parallèles aux trois limites du terrain, les cinq corps variant de R+8 à R+12 ont été générés par l'ouverture du cœur d'îlot sur la rue et le grand paysage. Plutôt que d'offrir une unique frontalité homogène et impassible, le bâtiment bifurque dans la profondeur autour d'un jardin central et généreux. De ce twist géométrique naissent une perception enrichie de la rue, des vues multipliées pour les logements, une transition singulière de l'espace public à la sphère privative, une continuité paysagère bienvenue avec le nouveau parc juste en face. Une saine respiration le long de cette avenue Pierre-Lefaucheux à l'alignement presque immuable, que le traitement pictural des nouvelles façades en verre émaillé vient exciter avec élégance. Ponctuées de balcons rapportés en béton blanc, préfabriqués avec jardinières intégrées, elles composent un tableau végétal précis et technique dont les teintes, plus denses en partie basse, s'estompent progressivement vers le ciel. Telle la persistance rétinienne du paysage alentour.
[ PROGRAMME ]
Cinq corps irrigués par cinq halls et des coursives extérieures se succèdent le long de ce ruban parfois interrompu par de généreux porches. Occupant l’angle sud, le foyer Alis se compose de 20 chambres, de différentes salles de soins, d’un restaurant et d’un jardin privatif à l’abri du tumulte de la rue. Les 159 logements jouissent quant à eux d’une réelle variété typologique : les simplex et duplex, qu’ils soient traversants, mono-orientés ou à double orientation, sont tous complétés d’un espace extérieur planté, balcon avec jardinières ou toiture-terrasse. Les deux programmes, dotés de halls différenciés, partagent tout de même le jardin central au boisement alluvial et des vues croisées sur la ville et la rue.
[ IMMEUBLE URBAIN ]
Des prescriptions urbaines et architecturales de Patrick Chavannes et Thierry Laverne, urbanistes du Trapèze, Aldric Beckmann et Françoise N'Thépé ont tiré le meilleur. Via des retraits parallèles ou non à la rue, ils ménagent des espaces de respiration, qui élargissent la perception de la rue Traversière au nord, instaurent la continuité avec le parc urbain au sud et démultiplient les vues lointaines des logements. Par le dessin de porches dans le soubassement, ils créent des transparences vers l'espace végétalisé du cœur d'îlot en continuité entre les sphères publiques et privées. Ainsi, c'est la parcelle tout entière qui dialogue avec la ville, malgré la nécessaire fermeture des niveaux bas qui abritent des logements.
[ REFLETS PÉRENNES ]
Cadrés par un attique et un soubassement en enduit blanc aspect béton, les 3 000 mètres carrés de bardage en verre émaillé sont développés sur six niveaux. Si différentes options ont été envisagées, comme la céramique par exemple, ce sont les produits verriers qui répondaient à toutes les volontés des concepteurs : reflets, tenue mécanique et pérennité des couleurs. Montés par panneaux de 1 mètre de largeur par 2,60 de hauteur, ce sont quelque 10 000 triangles de 49 teintes qui composent cette fresque scintillante. Avec l'idée de prolonger le contexte immédiat, les couleurs varient en fonction de leur orientation et positionnement : vert plus intense face au parc, virant vers le bleu dans les niveaux hauts et vers la Seine, camaïeux de rouge et de beige côté ville.
⇒ Projet paru dans exé 27 spécial façade métallique
FICHE TECHNIQUE
LOCALISATION Boulogne-Billancourt (92), France
ANNÉE 2016
ARCHITECTE Beckmann-N'Thépé architectes
COLLABORATEURS Sibylle Pöhler (chef de projet), Wilfried Daufy, Camille Garzuel, Maxime Laurent, Warren Mouran, Amélie Renevier, Marianne Richardot, Marine Tenette
MAÎTRISE D'OUVRAGE Nexity
AMÉNAGEUR Val-de-Seine
URBANISTE Patrick Chavannes
EXÉCUTION DJ AMO + AKPA
PROGRAMME Construction de 140 logements en accession et 19 logements sociaux, d'un foyer Maison Perce-Neige (association ALIS), jardins et parking 220 places
SURFACE PLANCHER 15 618 m²
COÛT DES TRAVAUX 39 millions d’euros HT
LIVRAISON Janvier 2016
BUREAUX D'ÉTUDES ET CONSULTANTS
STRUCTURE Scyna
4 FLUIDES HQE ID Bati
ÉCONOMIE LTA
ACOUSTIQUE Cap Horn Solutions
SSI Prévention Consultants
HQE Prévention Consultants, Citae
ENTREPRISES
GÉNÉRALE Bateg
BARDAGE GCEB
MENUISERIE EXTÉRIEURE Leuillet
ÉCLAIRAGE Idée Light
VRD Envert
GARDE-CORPS VITRÉS Seraba
SOL INTÉRIEUR JCMRS
MENUISERIE INTÉRIEURE Menuiserie Wood
PLOMBERIE Barth
FOURNISSEURS PRINCIPAUX
BARDAGE Alucobond 3A Composites
MENUISERIE EXTÉRIEURE Technal
MUR-RIDEAU Reynaers
BÉTON PRÉFABRIQUÉ Celtys
VERRE ÉMAILLÉ StoVentec