À l’image d’autres communes alpines, Tignes se compose de plusieurs hameaux disséminés à différentes altitudes. Et si leurs histoires sont évidemment liées, certaines ont été plus chaotiques que d’autres. Ainsi, en 1952, le sort de Tignes-le-Vieux et de ses 400 habitants fut scellé au nom de l’intérêt collectif : après déplacement du cimetière, expulsion des derniers réfractaires et dynamitage des bâtiments, le cœur du village, situé à 1 800 mètres, disparaissait sous les eaux du lac artificiel formé par le barrage du Chevril. La population délogée s’installe alors au hameau dit « Les Boisses », à quelques pas de là, qui se développe jusqu’au milieu des années 1970, période à laquelle la fièvre de « l’or blanc » s’empare de nos montagnes.
Parallèlement, la petite station de Tignes-le-Lac située à 2 100 mètres et créée par quelques pionniers dans les années 1950, continue de se moderniser et de s’étendre, notamment sous la direction d’architectes et urbanistes comme Raymond Pantz. Attirant progressivement les derniers Tignards qui montent s’y installer pour profiter, eux aussi, de cette nouvelle manne touristique, elle finit par détrôner l’ancien centre-ville des Boisses qui, délaissé et en friche, devient une banale aire de repos sur la route des pistes enneigées.
Aujourd’hui rebaptisé Tignes 1 800, il renaît après dix longues années d’études et de négociations. Logements pour locaux et saisonniers, résidences de tourisme, commerces et services de proximité ouvriront progressivement jusqu’en 2015. En concertation avec la mairie et pour le compte du promoteur MGM, spécialiste de l’immobilier montagnard, les architectes de l’atelier Plexus ont composé une nouvelle place de village autour de l’église jadis reconstruite, réplique de celle de Tignes-le-Vieux endormie sous les eaux. À l’inverse des choix effectués il y a 50 ans, l’agence utilise le bois et la pierre dans un style néo-savoyard, élégant et soucieux de son environnement, convoquant néanmoins une nostalgie discutable. Et si l’avant-garde en béton de Pantz est aujourd’hui remise en question, le temps d’une architecture contemporaine et montagnarde est largement venu.