La ville de Cachan lance en 2013 un concours pour la reconstruction de son marché couvert, alors édifié sur une parcelle prochainement traversée par la nouvelle ligne de métro construite dans le cadre du Grand Paris Express. Un projet urbain qui annonce une longue période de travaux pendant laquelle les habitudes seront perturbées, le paysage remodelé et la commune métamorphosée.
L'Avenue Léon-Eyrolles qui court depuis la gare RER jusqu'au centre-ville est une artère principale de la ville, au cœur même de ce grand mouvement. C'est là, dans un décor instable, que se découvre la silhouette compacte aux façades rythmées et à la toiture géométrique de la nouvelle halle du marché. Avec son entrée clairement identifiable grâce au volume en encorbellement qui la domine, revêtue d'Inox brossé en sous face et en façade, elle s'assume comme étant un signal clair et pérenne. Passé la porte, un espace horizontal et rationnalisé nous est offert : une étendue de 1 500 mètres carrés organisée autour de 16 stands bien définis. Le regard s'élève inévitablement vers la charpente bois impressionnante, avec ses six poutres treillis qui franchissent d'un seul tenant et découpent l'espace en fragments géométriques.
Comme pour palier à la dimension changeante de l'environnement, la lecture du projet se devait d'être limpide. De cette recherche de rigueur a découlé un système constructif pragmatique, répondant à deux contraintes principales.
D'abord un sol médiocre dû à l'activité d'une ancienne carrière. Ensuite des exigences programmatiques propres à une halle de marché, à savoir la libération du plan pour faciliter les échanges et les flux, ainsi que l'apport de lumière naturelle indirecte. Forts de ce constat, les architectes de l'agence Croixmariebourdon ont fait des choix essentiels. Il fallait s'ancrer très profondément dans le sol en des points précis et peu nombreux : deux files porteuses orientées nord-sud suffisent, qui prennent la forme de deux voiles de béton préfabriqué. Pour franchir les 30 mètres qui les séparent, six poutres treillis en bois lamellé-collé sont installées ; préfabriquées en usine, elles arrivent sur le chantier en deux parties qu'il faudra assembler sur place. Simplement jointes au sol avant d'être montées à l'aide d'une petite grue, leur mise en place est faite en un temps record, qui permettra ensuite d'enchaîner sur la mise hors d'air et hors d'eau du bâtiment. Toujours en filière sèche, le bac acier de la couverture est posé, bientôt suivi des châssis vitrés des outeaux et des façades est et ouest. Enfin, le bardage bois des façades aveugles nord et sud est mis en place. Le chantier a pu continuer sans encombre, laissant aux ouvriers le loisir de travailler à sec sans déranger les habitants des logements alentour. Sous la halle, les principaux ouvrages restants étaient ceux des éléments de serrurerie qui composent les ciels d'étals suspendus à la charpente bois ainsi que les installations des réseaux de fluides.
« Tout est calepiné ! », explique l'architecte Nicolas Croix Marie à propos du plan des étals, du rythme des châssis vitrés et de leur correspondance avec la trame structurelle... Toujours dans cette recherche de lisibilité qui fait écho au contexte flou des environs.
Le projet prend tout son sens quand la rigueur que les architectes se sont imposés dévie légèrement de sa trajectoire pour prendre les libertés nécessaires à l'appropriation du lieu par les usagers. Comme avec l'objet multifonction parfaitement optimisé et calibré qu'est la poutre treillis qui s'affranchit d'une géométrie parfaitement horizontale pour créer un toit mono-pente qui se justifie par des questions d'usage et d'impact dans la ville. L'extrémité la plus haute forme le porte-à-faux et s'ouvre vers la future esplanade et la gare de métro alors que la plus basse permet au bâtiment de se faire discret côté parc : selon son environnement proche, la halle s'adapte et devient tantôt un repère dans la ville, tantôt une composante du paysage. D'autre part, l'utilisation du bois était le choix le plus logique selon les architectes : il véhicule un sentiment chaleureux et accueillant, en adéquation avec les valeurs de rassemblement d'un marché de quartier. De plus, pour redonner un souffle de légèreté à l'ensemble, des dispositifs plus aléatoires viennent contraster avec la régularité de tout le reste. Comme disséminés au hasard sur la toiture, des outeaux triangulaires viennent illuminer les espaces plus sombres au nord du bâtiment. C'est dans le même registre que le couple Inox-bois se mêle au rythme aléatoire des couleurs vives en sous-face du plafond, pour dédramatiser cet intérieur très ordonné et mieux se fondre dans cette ville pleine de contrastes.
En s'inscrivant dans le paysage particulier de la ville sans s'effacer totalement, en répondant aux attentes de chacun sans céder aux exigences individuelles, la halle de marché assume sa présence et assure sa fonction avec brio.
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FICHE TECHNIQUE
♦ LOCALISATION Cachan (94), France
♦ ARCHITECTE croixmariebourdon architectes associés, Thomas Bourdon et Nicolas Croixmarie
♦ COLLABORATEURS Cédric Goury (chef de projet), Pierre Mouton (assistant)
♦ MAÎTRISE D'OUVRAGE Ville de Cachan
♦ PROGRAMME Reconstruction d'une halle de marché dans le cadre de l'aménagement de la future gare Arcueil-Cachan du Grand Paris Express
♦ SURFACE NETTE 1 800 m²
♦ COÛT DES TRAVAUX 2,3 millions d'euros HT
♦ ÉTUDES 8 mois
♦ CHANTIER 10 mois
♦ LIVRAISON Septembre 2014
BUREAUX D'ÉTUDES ET CONSULTANTS
♦ STRUCTURE EVP
♦ FLUIDES C-TEK
♦ ÉCONOMIE ECRH
♦ VRD ATPI
ENTREPRISES
♦ GÉNÉRALE Poulinge
♦ CHARPENTE FAÇADE BOIS Belliard
♦ ÉLECTRICITÉ Seeb
♦ CVC PLOMBERIE UTB
♦ PLÂTRERIE MENUISERIE INTÉRIEURE CARRELAGE PEINTURE TEP
♦ SOL COULÉ INTÉRIEUR Colas IDF
♦ VRD ATV
♦ ESPACE VERT Eurovert
FOURNISSEURS PRINCIPAUX
♦ BAC ACIER COUVERTURE Hacierco Arcelor Mittal
♦ ISOLATION Rockwool
♦ ÉTANCHÉITÉ Soprema
♦ REVÊTEMENT BOIS Binderholz
♦ POLYCARBONATE Makrolon
♦ PROFIL ACIER Stabalux
♦ ÉCLAIRAGE INTÉRIEUR Baudroie, Epsilon+
♦ ÉCLAIRAGE EXTÉRIEUR Escofet, Epsilon+, Cardenum