D’innombrables feuilles ont été imprimées, des millions de livres et de fascicules ont été distribués, faisant du groupe Hachette Livre l’un des leaders mondiaux de l’édition. Composé de quelque 150 marques dont 67 maisons aussi diverses que la Bibliothèque Rose, Calmann-Lévy, Larousse et Stock entre autres, il est présent dans le monde entier et ne compte pas moins de 7 000 collaborateurs. Six cent cinquante d’entre eux sont concernés par la décision de quitter les locaux historiques du quai de Grenelle dans le 15e arrondissement parisien, pour s’installer à Vanves sur un terrain appartenant à l’éditeur, occupé par un immeuble de 11 000 mètres carrés promis à la démolition. Et c’est l’architecte Jacques Ferrier qui sort vainqueur du concours organisé en 2009, en proposant l’édification d’un seul volume de 21 000 mètres carrés, homogène et vibrant, imposant et réservé.
Depuis la rue Jean-Bleuzen, la frontalité est revendiquée mais avec la légèreté du papier. Si la masse et le gabarit sont perceptibles, ils le sont, générés par une enveloppe ivoire et blanche délicatement tendue entre ciel et asphalte. Mise en œuvre à l’identique sur toute la périphérie du bâtiment, elle est composée d’un mur-rideau de verre sérigraphié et de brise-soleil en aluminium. Ceux-ci ayant une section variable qui augmente avec les étages, dotant ainsi l’ensemble de mouvement et de matière. L’homogénéité ainsi obtenue, loin d’être monotone, est garante d’une capacité à faire face à un environnement disparate et déséquilibré. Cintrée sur l’axe médian du volume, elle est parfois interrompue par des failles et des patios aux façades plus classiques qui apportent la lumière naturelle au cœur des six plateaux de bureaux. Ceux-ci, parfois très épais, ont été conçus afin de répondre à une demande très précise du maître d’ouvrage quant à l’autonomie des quelque 67 maisons d’éditions qui composent sa société. Chacune devant pouvoir établir son territoire au-delà du couloir desservant des enfilades de boîtes vitrées. Les distributions se font alors cheminements, bifurcations et déambulations, qu’il faudra apprendre à maîtriser, ponctuées d’espace de rencontre, de terrasses accessibles et de vues sur les villes voisines.
Profondeur
L’environnement hétérogène du site est typique de la proche banlieue parisienne ; entre un immense immeuble de bureaux, une enclave pavillonnaire et des barres de logements, la parcelle s’étire tout en longueur sur 120 mètres jusqu’aux voies ferrées qui la ferment au sud. N’est tout d’abord visible depuis la rue Jean-Bleuzen que la plus petite façade de l’édifice dont l’entrée est logiquement annoncée par un impressionnant porte-à-faux au-dessus du parvis. Mais à force de redents, de hauteurs et de flancs cintrés, c’est finalement l’ensemble qui respire, dégagé des mitoyens, perceptible dans sa totalité, jusqu’au jardin des Papyrus, conçu par l’agence TER, qui le longe à l’ouest.
Façades
Si l’évocation des feuilles de papier semble évidente, elle n’en est pas moins sensée et élégante. Rendant quasi immatérielle la présence de ces quelque 21 000 mètres carrés, un voile vibrant couleur ivoire est développé sur la totalité des façades urbaines. Pensé depuis l’intérieur des bureaux, chaque brise-soleil en tôle d’aluminium pliée et perforée est disposé sur la même trame que les montants verticaux du mur-rideau qu’il dédouble, orientant ainsi les vues plus qu’il ne les obstrue. La sérigraphie de couleur blanche des éléments vitrés venant amplifier la quiétude qui se dégage de l’édifice.
Déambulations
Aux enjeux premiers de confort et de luminosité auxquels des plateaux aussi épais font face, il s’agissait aussi de faire écho à la diversité des maisons d’éditions qui constituent la société Hachette Livre. Car si toutes travaillent à la pérennité du groupe, elles n’en restent pas moins indépendantes, voire même concurrentes. Évitant l’écueil de rangées de bureaux systématiquement réparties de part et d’autre d’un couloir, les circulations sont ici des déambulations, des promenades passant d’une atmosphère à une autre. Patios, failles et loggias venant fluidifier une organisation singulière et différente à chaque étage.