La Côte d’Azur, on le sait, attire beaucoup de monde. Et pour que chacun ait sa place au soleil, les constructions ont remplacé les restanques aux essences méditerranéennes, ceci au prix d’un urbanisme organique, voire chaotique. Ainsi, dans le quartier niçois Caucade-Californie, le Logis Familial a-t-il dégotté un terrain exigu, pincé entre le relief escarpé qui mène à la Corniche fleurie et la voie rapide Pierre-Mathis, doublée de voies ferroviaires. Opportunité foncière faisant, il est envisagé d’y édifier treize logements. Autant dire une gageure.
Faute d’orientation vers le sud et donc de vue directe sur la Méditerranée à cause des infrastructures de transport, Pierre-André Comte et Stéphane Vollenweider trouvent toutefois la parade en allant chercher des horizons visuels consolants : au sud-ouest le tableau naturaliste proposé par l’extrémité du parc d’un immeuble résidentiel en surplomb de l’avenue Sainte-Marguerite, au nord-est quelques poches plantées par des habitants qui préservent leur paradis personnel. Ménageant une distance honorable par rapport à la voie rapide, sur un socle de garages enterré, les trois plots R+4, dont deux accolés, qui composent cette opération sont tournés vers ces respirations vertes. « La morphologie du bâti participe de la dynamique environnementale, incluant la mise en place de jardins d’hiver qui, en plus d’offrir des espaces de vie complémentaires, permettent un apport de calories en hiver tout en protégeant des nuisances acoustiques », expliquent les architectes. Ainsi, de larges et profondes loggias, doublées d’une façade transparente constituée de vitrages amovibles, réalisent-elles des extensions vivables toute l’année, atténuant l’ensoleillement direct en été, formant écran au vent d’hiver. À défaut de vue sur la mer, elles sont traitées en bleu outremer sur le fond, en hommage à l’artiste niçois Yves Klein. Cette variante du lapis-lazuli propose une atmosphère particulière qui irradie au-delà des logements.
Les volumes habités sont protégés par une peau métallique faite de panneaux d’aluminium thermolaqué nervuré, en recouvrement de l’isolation extérieure et des murs en béton qui forment un front acoustique. Sa tonalité dorée est complémentaire du bleu Klein, et rend précieuse cette opération dans un environnement corrompu. Simplex et duplex sont superposés et, malgré les contraintes sonores de la voie rapide, quelques ouïes en doubles fenêtres sont pratiquées dans l’épaisse carapace afin de capter des vues au sud. Avec un indice ≥ à 43 pour les menuiseries extérieures, et un traitement phonique des dalles à 45 dB, un confort certain est assuré. Certes, ce ne sont pas les palaces de la Côte – qui, finalement, subissent aussi les désagréments de la circulation sur la promenade des Anglais –, mais les espaces sont agrémentés de lumières plurielles, directes et diffuses, grâce à des orientations multiples. Toutefois, à cause de contraintes essentiellement économiques, séjours et cuisines sont tenus dans un volume unique « avec à chaque fois deux ouvertures, pour apporter lumière et ventilation naturelle », argumentent les concepteurs, qui regrettent de n’avoir pu être plus généreux pour les salles de bains.
Dans le vide interstitiel de cette composition sont glissés les accès. Souvent aveugles dans ce type de programme, ces espaces de transit revêtent un caractère particulièrement lumineux, au gré des humeurs du métal qui varie d’un jaune d’or à un cuivré rougeoyant selon l’état du ciel. De plus, les volées d’escaliers qui enrubannent l’ascenseur sont rythmées par les échancrures résultant de la fragmentation de la masse bâtie, concédant des aperçus vers la mer. Une attention qui importe à Comte & Vollenweider, en témoignent (avec succès) les opérations du Gallienice dans cette même ville ou encore des Passantes à Mouans-Sartoux, avec leurs coursives partagées. Pour Le Cédrat, elles sont concentrées dans la verticale sans pour autant étouffer, grâce à un jeu de paliers désolidarisés des volumes principaux, afin de disposer des seuils particuliers avant de pénétrer dans chaque « maison ». Ainsi, la résidence du Cédrat offre-t-elle cette densité intermédiaire qui abjure l’étalement urbain du pavillonnaire dont cette côte a déjà fait les frais.
Enfin, fort de sa chaufferie collective au gaz couplée à des panneaux solaires pour l’eau chaude sanitaire, d’une isolation par l’extérieur bardée de métal léger ou encore d’un traitement du bassin de rétention des eaux de pluie en pneus recyclés (Draingom®) – nécessaire dans cette région soumise à de forts orages –, l’édifice a été certifié Habitat & Environnement millésime 2012, option BBC Effinergie. Et, malgré le site ingrat et difficile d’accès, le chantier propre a accompagné sa valorisation énergétique et humaine. En outre, ce projet respecte un certain ensoleillement du voisinage déjà doté de piscines, et propose même, grâce à sa robe dorée, de renvoyer les rayons du soleil, compensant ainsi cette part d’ombre empruntée pour loger les nouveaux résidents.